Une nouvelle étude de l’AEN sur les stratégies de financement
L’augmentation des investissements dans l’énergie nucléaire fait partie des principaux défis pour les pays membres de l’OCDE et de l’AEN qui souhaitent construire de nouvelles centrales nucléaires. Le rapport de l’Agence de l’énergie nucléaire (AEN) «Effective Frameworks and Strategies for Financing Nuclear New Build» propose un tour d’horizon des stratégies de financement au niveau mondial et crée une base de comparaison des différentes approches. À partir de huit cas d’études, il identifie les avantages et les inconvénients de ces stratégies ainsi que les principaux éléments qui pourront être exploités par les décideurs politiques et le secteur privé pour multiplier par trois les capacités nucléaires d’ici à 2050.
Les principaux défis posés aux nouveaux projets nucléaires, en particulier dans les pays membres de l’OCDE et de l’AEN, concernent le financement, les chaînes d’approvisionnement et la disponibilité de la main-d’œuvre. Par ailleurs, les projets passés ayant accusé des dépassements de coûts et des retards ainsi que la libéralisation des marchés de l’énergie rendent plus difficile ce financement.
Huit cas d’études
Le document «Effective Frameworks and Strategies for Financing Nuclear New Build» présente huit cas d’études dont l’objectif est d’analyser les avantages relatifs des différentes approches de financement.
Ces cas d’études portent sur trois projets déjà en exploitation (Olkiluoto 3 en Finlande, Vogtle 3 et 4 aux États-Unis, Barakah aux Émirats arabes unis), deux projets en construction (Akkuyu en Turquie et Hinkley-Point-C en Grande-Bretagne), un projet au stade de la décision d’investissement finale pour lequel la construction n’a pas encore commencé (Paks-II en Hongrie), et deux projets en attente de la décision d’investissement finale (Sizewell-C en Grande-Bretagne et Dukovany en République tchèque).
Tous ces projets couvrent différentes approches de financement de centrales nucléaires, qui combinent mesures politiques et sources de financement. Ils peuvent être répartis en quatre catégories:
- Financement basé sur des revenus réguliers: Concernant Akkuyu, Barakah, Dukovany et Hinkley-Point-C, les financements reposent sur des mécanismes de régulation des revenus, par exemple sur des contrats de fourniture d’électricité ou des contrats d’écart compensatoire (Hinkley-Point-C).
- Financement basé sur une couverture des coûts: Vogtle 3 et 4 ainsi que Sizewell-C misent sur des conditions-cadres réglementaires spécifiques pour la récupération des coûts de construction. Vogtle est financée par des règles de récupération des coûts de construction tandis que Sizewell-C repose sur le modèle de financement Regulated Asset Base (RAB, bases d’actifs régulés).
- Financement basé sur un modèle coopératif: Olkiluoto 3 en Finlande met en œuvre le modèle Mankala, qui consiste à vendre aux actionnaires de l’entreprise l’électricité produite aux coûts de production.
- Financement par les fournisseurs: Dans le cas de la centrale hongroise Paks-II, le financement repose principalement sur un financement par les fournisseurs, 80% des coûts étant couverts par les dettes du pays fournisseur (la Russie).
Le rapport fournit des indications sur les différents modèles de financement dans la perspective de futurs projets nucléaires. Il met en avant plusieurs aspects clés qui doivent être pris en compte pour structurer le cadre financier:
- Les modèles de financement dépendent fortement du contexte national et industriel: Les cadres financiers doivent être adaptés au contexte politique et industriel concerné. Un modèle qui rencontre un succès dans un pays, comme c’est le cas du modèle RAB en Grande-Bretagne ou du modèle Mankala en Finlande, ne peut être reproduit dans d’autres pays sans tenir compte des conditions spécifiques à ces derniers.
- Les modèles de financement ne peuvent pas supprimer les erreurs de planification structurelles: Un engagement national à long terme en faveur de l’énergie nucléaire et une planification solide an amont sont essentiels. Souvent, les problèmes de financement à eux seuls ne font pas échouer un projet mais ils révèlent des problèmes structurels sous-jacents.
- La réduction du risque lié à la construction est essentielle: Les risques tels que les retards de construction et les dépassements de coûts représentent les principaux défis à relever. Il est primordial de répartir clairement les risques entre les périodes avant et pendant la construction. Au final, ce sont les consommateurs et les contribuables qui supportent le plus de risques, en particulier les risques rares mais lourds de conséquences. Une répartition juste des risques peut également faire baisser les coûts du financement, ce qui permet aux consommateurs de bénéficier de prix de l’électricité plus bas.
- La nécessité que les intérêts des différents acteurs convergent: Il est important que les intérêts de tous les acteurs convergent, que cela concerne les gouvernements, les investisseurs ou les communautés locales. Une répartition claire des risques doit toujours poursuivre l’objectif de garantir la réussite du projet grâce à des décisions transparentes et responsables.
D’après le rapport de l’AEN, ces principes sont décisifs pour la mise en œuvre réussie des projets nucléaires, et ils doivent être au cœur des préoccupations lors de la mise au point des modèles de financement.
Source
M.A./C.B. d’après le rapport de l’AEN «Effective Frameworks and Strategies for Financing Nuclear New Build» du 18 septembre 2024
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