Australie: mise au point d’un nouveau matériau pour extraire l’uranium des fonds marins
Un matériau permettant de retirer l’uranium des eaux océaniques de manière sélective a été développé en Australie. Pour ce faire, la structure du matériau de base a été modifiée grâce à l’ajout de quantités infimes de néodyme. La fabrication de ces matériaux étant peu coûteuse, ceux-ci pourraient être utilisés pour extraire de l’uranium à grande échelle.
L’uranium extrait du sol est utilisé en tant que combustible nucléaire dans le monde entier. Toutefois, avec une quantité totale de 4,5 milliards de tonnes, le minerai est mille fois plus présent dans les océans. Mais dans cet environnement, il est fortement dilué et difficile à extraire. «Le principal problème réside dans le fait que d'autres substances telles que le fer et le calcium sont présentes dans les mers, le sel et les minéraux, dans des quantités bien plus importantes que l’uranium», explique la chercheuse australienne Jessica Veliscek Carolan de la University of New South Wales (UNSW). D'autres nations travaillent aussi à l’extraction, à moindres coûts, de l’uranium des eaux océaniques. La Chine a ainsi annoncé en mai 2023 avoir réalisé des tests de terrain en mer de Chine méridionale grâce à des expériences de test sur les matériaux et de mise à l'échelle.
Un matériau prometteur pour extraire de l’uranium
La chercheuse de l’UNSW dirige une équipe internationale qui a «découvert qu’en dopant un matériau prometteur, il est possible de mettre au point une méthode simple et efficace d’extraction de l’uranium des océans», a indiqué l’Australian Nuclear Science and Technology Organisation (Ansto), qui a également participé à l’étude. Le matériau concerné est le «Layered double hydroxides» (LDH), ou hydroxyde double lamellaire (HDL). «Les HDLs sont intéressants en raison de leur capacité à extraire les métaux. Ces matériaux peuvent être fabriqués facilement, puis modifiés dans le but d’améliorer leur fonctionnement. Ces couches possédant des charges positives et négatives, elles peuvent être adaptées de sorte à pouvoir capter certaines substances telles que l’uranium.»
Formulé plus simplement, les HDLs peuvent être comparés à des sandwichs. Les couches (tranches de pain) sont composées d’ions métalliques chargés positivement (par ex. de magnésium et d’aluminium) et de deux ions hydroxyde. La garniture du sandwich se trouve entre les tranches de pain: les molécules d’eau et les anions chargés négativement tels que le nitrate et le carbonate, qui équilibrent la charge. Le carbonate d’uranyle, qui doit être retiré des eaux, est lui aussi un anion.
De meilleures propriétés grâce à l’ajout de substances étrangères
D'après l’Ansto, les scientifiques ont ajouté au matériau de faibles quantités de substances étrangères (substances dopantes): le néodyme, l’europium et le terbium, afin de tester leur effet. «L’ajout de néodyme permet d'améliorer la capacité des HDLs à séparer spécifiquement l’uranium des eaux océaniques», a déclaré Ansto avant d’ajouter que «Lorsque le néodyme a été ajouté aux HDLs, ces matériaux ont préféré l’uranium à dix autres éléments davantage présents dans des échantillons d’eau de mer.»
Grâce à plusieurs méthodes d’analyse, les scientifiques ont pu identifier la manière dont l’uranium extrait de l’eau de mer (présent en tant qu’ion d’uranyle chargé négativement) interagit avec les ions métalliques chargés positivement présents dans les HDLs et le rôle joué par le néodyme: «Nous avons obtenu une information décisive concernant le fait que la substance dopante néodyme modifie la manière dont l’uranium se lie aux HDLs. En ajoutant du néodyme [...] à la structure HDL, la liaison chimique entre les atomes métalliques et l'oxygène [du carbonate d'uranyle] dans le HDL est devenue davantage ionique. Grâce à cette liaison ionique améliorée, ces matériaux ont pu se lier beaucoup mieux à l'uranium via des interactions ioniques de surface.», a décrit l’Ansto.
D’après les scientifiques, les HDL peuvent être fabriqués de manière simple et à faibles coûts, ce qui les rend efficaces pour l’extraction d’uranium à grande échelle.
Source
B.G./C.B. d’après un communiqué d’Ansto du 12 octobre 2023 et lala 8e édition de l’étude Energy Advances du 1er août 2023